Spinosauridae
  Classification des Spinosauridae
 


La classification des Spinosauridae a été très controversée parmi les paléontologues. L’idée que
Baryonyx et Spinosaurus furent des formes relativement proches fut défendue pour la première fois par Paul (1988) et Buffetaut (1989a, 1992) et est généralement accepté par l’ensemble des paléontologues ayant étudiés les Spinosauridae (Kellner et Campos, 1996 ; Charig et Milner, 1997 ; Taquet et Russell, 1998 ; Sereno et al., 1998).
Charig et Milner (1997) placent Spinosaurus et Baryonyx dans deux familles distinctes, respectivement les Spinosauridae et les Baryonychidae, et incluent ces deux familles dans la superfamille des Spinosauroidea, un arrangement systématique qui fut poursuivit par Naish et al. (2001). Cependant, Sereno et al. (1998) donnent à ces taxons des rangs inférieurs en définissant les deux sous-familles Spinosaurinae et Baryonychinae qui se trouvent incluses dans la famille des Spinosauridae. Cette proposition a été suivie par Buffetaut et Ouaja (2002) et par les auteurs des dernières publications scientifiques sur les Spinosauridae (ex. Ruiz-Omeñaca et al., 2005 ; Dal Sasso et al., 2005).
Position phylogénique des Spinosauridae parmis les Neotheropoda (Sereno et al., 1998 ; modifié).


La classification des Spinosauridae a été compilée dans un tableau référant l'entièreté des membres de cette famille, qu'ils soient valides ou non, déterminés ou indéterminés. Cliquez sur le tableau ci dessous pour l'afficher.


Les Spinosaurinae

Les Spinosaurinae comprennent évidemment le genre Spinosaurus lui-même. Derrière ce genre sont regroupés deux espèces. La première est Spinosaurus aegyptiacus dont l’holotype fut découvert et décrit par Stromer (1915) sur base d’un fragment d’un maxillaire édenté, d’une mandibule partielle avec quatre dents, des dents isolées, des vertèbres dorsales ainsi que des côtes et des gastralia incomplètes (Stromer, 1915, 1936). Ces ossements ont été découverts dans les sédiments continentaux de l’oasis de Baharija datés du Cénomanien et situé à l’ouest du delta du Nil en Egypte. Stromer (1934) identifie d’autres os postcrâniens du même site et dénomme une nouvelle espèce « Spinosaurus B » qui diffère d’un point de vue morphologique et dont la taille est proportionnellement plus petite que S. aegyptiacus. Sereno et al. (1998) réinterprètent cependant ce matériel comme appartenant à l’espèce Carcharodontosaurus saharicus. Les ossements décrits par Stromer ont été malheureusement perdus durant la destruction de la Palaëontologische Staatssammlung de Munich par les anglais lors d’un raid aérien en 1944 (Buffetaut, 1989a) mais d’excellents dessins ont été réalisés par Stromer. Rauhut (2003) estime d’ailleurs sur base de ceux-ci que l’holotype de Spinosaurus est une chimère et que cette espèce comprend plusieurs ossements de dinosaures. Cette considération a été réfutée par Dal Sasso et al. (2005) qui considèrent que les ossements de Spinosaurus aegyptiacus proviennent bien de la même espèce. Des dents ont été également rapportées à l’espèce Spinosaurus aegyptiacus (Sidleir, 1998). Buffetaut (1989a) identifie deux fragments de mâchoire et des dents isolées de Spinosaurus provenant des Kem-Kem. Récemment, Dal Sasso et al., (2006) rapprochent aussi à l’espèce Spinosaurus aegyptiacus une partie antérieure du museau et un fragment de nasal de grande taille provenant également des Kem-Kem.
La seconde espèce est Spinosaurus maroccanus qui fut découvert dans le Tafilalt et décrite par Russel (1996) sur base des centres vertébraux. D’après Russel (1996), ces derniers diffèrent dans leur proportion par rapport à ceux de Spinosaurus aegyptiacus. Rauhut (2003) attribue cette différence à une position plus rostrale des vertèbres dans la série des vertèbres cervicales. Cette hypothèse a également été réfutée par Sereno et al. (1998) et Buffetaut et Ouaja (2005) qui estiment que cette comparaison qui n’a pu se faire que sur base des descriptions et des planches de Stromer (1915) est très légère. Ils considèrent donc Spinosaurus maroccanus comme un nomen dubium. Taquet et Russel (1998) réfèrent également un fragment de mâchoire supérieure, des centres de vertèbres cervicales et un arc neural d’une vertèbre dorsale provenant de l’Aptien du Niger (Gadoufaoua) et de l’Albien d’Algérie (Gara Samani, Nord-ouest du Tademaït) à cette dernière espèce. Sereno et al. (1998), Buffetaut et Ouaja (1998) et Dal Sasso et al. (2005) considèrent une nouvelle fois que ce matériel peut être tout à fait comparable à Spinosaurus aegyptiacus qui n’inclut que des restes fragmentaires de maxillaires. Ils affirment donc, comme Dal Sasso et al. (2005), qu’il n’y a aucune évidence de l’existence de plus d’une espèce de Spinosaurus dans l’Albien et le Cénomanien du Nord de l’Afrique. Une mâchoire correctement préservée provenant des Kem-Kem est actuellement étudiée par Milner et pourra peut-être permettre de confirmer ou d’infirmer cette considération.


Squelette reconstitué de Spinosaurus aegyptiacus sur base du matériel découvert par Stromer (1915) et Taquet & Russel (1998). Dessin de Scott Hartman (http://www.skeletaldrawing.com/).

Sereno et al. (1998) et Buffetaut et Ouaja (2002) placent de même dans la famille des Spinosaurinae l’espèce Irritator challengeri sur base d’un crâne presque complet découvert dans l’Albien du Brésil qui fut d’abord attribué à un Maniraptora (Martill et al., 1996 ; Sues et al., 2002). Plusieurs caractères anatomiques concernant les dents suggèrent que cette espèce est plus proche de Spinosaurus que de Baryonyx.
Angaturama limai (Kellner et Campos, 1996) est une seconde espèce qui provient de la même formation de Santana du Brésil. Décrite sur base de l’extrémité antérieure d’un museau, elle est actuellement considérée comme un synonyme junior d’Irritator challengeri (Charig et Milner, 1997 ; Sereno et al., 1998 ; Buffetaut et Ouaja, 2002 ; Sues et al., 2002) car les morceaux de crâne des deux espèces se complètent exactement anatomiquement et appartiennent très probablement au même spécimen (Sereno et al., 1998). Sues et al. (2002) suggèrent qu’Irritator est congénérique avec Spinosaurus mais Dal Sasso et al. (2005) ont pu affirmer que les deux taxa peuvent être rapprochés mais montrent néanmoins des différences notables qui permettent de les classer dans deux genres différents.

Crâne reconstitué d'Irritator challengeri (partie postérieure, Sues et al. 2002) et d'Angaturama limai (partir antérieure, Kellner & Campos, 1996). Dessin de James Headden (http://qilong.8m.com/)
 

Les Baryonychinae
Les Baryonychinae comprennent l'un des plus complets Spinosauridae connus à ce jour, Baryonyx walkeri, qui fut découvert en janvier 1983 par William Walker dans les argiles du Barrémien inférieur qui se situent non loin de Dorking, dans le Surrey, en Angleterre (Charig et Milner, 1986). Cette espèce est un squelette incomplet mais bien préservé comprenant un grand nombre d’ossements désarticulés qui furent décrits en détail par Charig et Milner (1997). Martill et Hutt (1996), Charig et Milner (1997) et Martill et Naish (2001) ont décrit des dents provenant de l’Hautérivien du Sussex et du Surrey ainsi que du Barrémien de l’Ile de Wight qu’ils rapportent également à un Baryonychinae ou au genre Baryonyx lui même. Des dents datées de l’Hautérivien supérieur à l’Aptien inférieur (Viera et Tores, 1995 ; Torcida Fernãndez et al., 1997 ; Ruiz-Omeñaca et al., 1998 ; Torcida Fernãndez et al., 2003 ; Canudo et Ruiz-Omeñaca, 2003 ; Canudo et al., 2004 ; Ruiz-Omeñaca et al., 2005) ainsi qu’un fragment de maxillaire du Barrémien (Charig et Milner, 1997) provenant de différentes localités d’Espagne ont aussi été rapprochés à la sous-famille des Baryonychinae et à Baryonyx. Le nombre important de dents qui ont été découvertes en Espagne suggère l’existence de deux baryonychinés dans la Péninsule Ibérienne en plus de l’espèce Baryonyx walkeri. Taquet (1984) décrit un fragment de mâchoire provenant du gisement de Gadoufaoua du Niger et le défini comme étant un dentaire d’un nouveau genre de Spinosauridés. Cet os fut redécrit par Kellner et Campos (1996) et Taquet et Russel (1998) comme étant plutôt un prémaxillaire. Taquet et Russel (1998) définissent sur base de cet os, ainsi que d’un maxillaire droit et un dentaire découvert également au Niger, une nouvelle espèce, Cristatusaurus lapparenti, qu’ils estiment plus proche de Baryonyx que d’Irritator (et Angaturama) mais qui se distinguerait de Baryonyx par « une condition bevirostre du prémaxillaire ». Cependant, Charig et Milner (1986, 1990, 1997) et Ouaja et Buffetaut (2002) trouvent que le prémaxillaire décrit initialement par Taquet (1984) ressemble fortement à celui de Baryonyx et ces derniers estiment qu’il n’y a aucune différence significative entre le prémaxillaire du Niger et celui de Baryonyx. Naish et al. (2001) et Buffetaut et Ouaja (2002) considèrent que l’espèce Cristatusaurus lapparenti et Baryonyx walkeri ne sont pas distinguable. Sereno et al. (1998) regardent cette espèce comme un nomen dubium et le matériel décrit par Taquet et Russel (1998) appartient à une espèce indéterminée de Baryonychinae. Charig et Milner (1997) et Buffetaut et Ouaja (2002) estiment Cristatusaurus comme un synonyme junior de Baryonyx et le réfèrent comme un Baryonyx sp.
Peu après la publication de Taquet et Russel (1998), Sereno et al. (1998) annonce la découverte d’un autre baryonychiné dans la même formation du Niger. Il dénomme, à partir de restes crâniens et post-crâniens en nombre relativement important, un nouveau genre et une nouvelle espèce, Suchomimus tenerensis qui se distingue de Baryonyx walkeri par plusieurs synapomorphies (Sereno et al., 1998). Sues et al. (2002) et Milner (2003) considèrent cependant que les différences anatomiques entre Suchomimus et Baryonyx ne sont pas assez importantes pour les classer dans deux genres distincts et qu’il s’agit plutôt de deux espèces différentes. Ainsi, d’après ceux-ci Suchomimus est un synonyme junior de Baryonyx et devient Baryonyx tenerensis.


 Squelettes reconstitués de Suchomimus tenerensis (Sereno et al. 1998) et Baryonyx walkeri (Charig & Milner, 1997). Dessin de Scott Hartman (http://www.skeletaldrawing.com/).

Les Spinosauridae inclassables
Buffetaut et Ingavat (1986) décrivent des dents trouvées dans la Formation de Sao Khua du Jurassique supérieur du Nord-est de Thaïlande et définissent sur base de celles-ci la nouvelle espèce Siamosaurus suteethorni référée provisoirement à la famille des Spinosauridae. Celle-ci fut remise en cause par Sues et al. (2002) qui estiment que le matériel est insuffisant pour établir des affinités avec les Spinosauridae. Des découvertes ultérieures dont nottament des vertèbres ont cependant pu confirmer l’existence des Spinosauridae en Asie du Sud-est (Buffetaut et Suteethorn 1998 ; Buffetaut et al., 2004) qui ne sont pour l’instant connus en Thaïlande que par des dents et des restes postcrâniens (Buffetaut et Suteethorn, 1998 ; Buffetaut et al., 2004 ; Buffetaut pers. commun.).
Hasegawa et al. (2003) ont décrit des dents provenant de la Formation de Sebayashi de Gunma du Japon datée du Crétacé inférieur et qui semblent appartenir à des Spinosauridae. Plus récemment encore, Buffetaut et al. (2008) ont attribuées des dents provenant du Sud de la Chine et initialement rapprochées au pliosaure Sinopliosaurus fusuiensis a un Spinosauridae proche de Siamosaurus suteethorni.

Fausses attributions aux Spinosauridae
Stromer (1931) attribue du nouveau matériel postcraniens (plusieurs vertèbres cervicales, dorsales et caudales ainsi qu'un fémur et un tibia) provenant d'Egypte au genre Spinosaurus qu'il nomme plus tard dans une nouvelle publication "Spinosaurus B" (Stromer, 1934). Il considère ces ossements comme appartenant à deux individus et à une nouvelle espèce de Spinosaurus qu'il distingue de Spinosaurus aegyptiacus decrite plus de 15 années auparavant (Stromer, 1931). Stromer (1934) doute lui même de l'attribution des membres à Spinosaurus en raison de leur petite taille. Il note cependant que les vertèbres, dont les dorsales sont pourvues d'épines neurales courtes contrairement à Spinosaurus aegyptiacus, peuvent être attribuées au genre Spinosaurus (Stromer, 1934). Russel (1996),  Sereno et al. (1998) et Novas et al. (2005) ont remis en cause l'attribution de ces ossements à un Spinosauridae. Russel (1996) considère que les vertèbres cervicales et caudales appartiennent au nouveau genre Sigilmassasaurus brevicollis qu'il vient de décrire et qu'il rapproche à un Tetanurae indéterminé. Sereno et al. (1998) identifient les ossements de "Spinosaurus B", tout comme ceux de Sigilmassasaurus brevicollis, comme appartenant au Carcharodontosauridae Carcharodontosaurus saharicus. Novas et al. (2005) rejettent cependant cette attribution à Carcharodontosaurus compte tenu de la morphologie distincte de ces vertèbres de celles du nouveau Carcharodontosauridae Tyrannotitan. Ces auteurs voient dans le matériel de "Spinosaurus B" des vertèbres cervivales qu'ils rapprochent au théropode énigmatique Sigilamassasaurus et des vertèbres caudales qu'ils attribuent à un ornithopode Iguanodontidae. D'après ces auteurs, la morphologie des vertèbres caudales de "Spinosaurus B", tout comme celle de Sigilmassasaurus, est très proches de celle d'Ouranosaurus nigeriensis décrit par Taquet (1976), observation qu'avait également faite Russel dans sa description de Sigilmassasaurus (Russel, 1996). Novas et al. (2005) concluent ainsi que "Spinosaurus B" est un mélange de trois individus, un théropode inconnu plutôt frêle en ce qui concerne les os des membres, un Iguanodontidae pour les vertèbres caudales et le Tetanurae énigmatique Sigilmassasaurus (Russel, 1996) pour les vertèbres cervicales.
Neesov (1995) décrit des dents provenant du Santonien - Campanien d'Ouzbékistant et les attribue au nouveau genre Asiamericana asiatica qu'il rapproche soit aux Spinosauridae, soit aux poissons Saurodontidae. Il confirmera plus tard l'appartenance de ces dents au dernier groupe (Nessov, 1997). Cette attribution fut supportée tout dernièrement par Buffetaut et al. (2008).

 
 
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